Avec la sortie imminente de Faux-Semblants, je me suis dit qu’il serait intéressant d’en parler plus en détail que dans un simple post ou une story Instagram. Et quoi de mieux que de revenir aux tout débuts : comment l’idée m’est-elle venue ? Comment s’est déroulée l’écriture ? Comment ces personnages ont-ils pris vie ?
Tout a commencé durant l’été 2023, lorsque les éditions Harlequin ont annoncé un concours de romance, la &H Academy. Je venais de terminer le dernier tome de Sensitive Love, une saga de cinq tomes sur laquelle je travaillais depuis 2017. Autant dire que j’avais envie de tourner la page des sagas et trilogies pour me consacrer à un one-shot. Le thème du concours était le fake dating et ça tombait bien : depuis des années, j’avais envie d’écrire une histoire de mariage de convenance. Je voyais là une occasion idéale.
J’étais prête à me lancer… jusqu’à ce que je relise les règles et découvre que seul le fake dating était accepté. (Ironie du sort : j’ai appris plus tard que les mariages arrangés/de convenance passaient aussi, mais j’avais déjà changé d’orientation.) Je me suis donc recentrée sur le fake dating – une trope que je voulais explorer sérieusement depuis longtemps. J’avais déjà esquissé ce thème dans Si demain je tombe (2022), mais il n’était pas central. Cette fois-ci, je voulais qu’il soit au cœur de l’histoire.
Restait à trouver une raison originale pour que deux personnages fassent semblant d’être ensemble. C’est là que sont arrivées les idées de rivals to lovers et de dark academia. Contrairement à d’habitude, où la dynamique de mes personnages se construit au fil de l’écriture, j’ai imposé dès le départ : ils seraient rivaux, ils devraient faire semblant d’être ensemble. Voilà comment est née l’idée principale.
Très vite, une autre envie s’est imposée : écrire mon premier personnage principal noir. J’avais déjà créé une héroïne métisse, mais je voulais mettre en avant une femme noire dans un contexte académique, justement parce qu’on les voit rarement représentées – comme si elles n’avaient pas leur place dans ce type d’univers. C’était aussi une manière de parler de l’expérience d’être une personne racisée dans un établissement essentiellement blanc : ce sentiment d’angoisse et de solitude quand l’on réalise que l’on est la seule. Je l’ai vécu au collège, au lycée et même à la fac, et ça m’a profondément marquée.
À cela s’ajoutait la question sociale : être une étudiante boursière dans un établissement privé, ce que j’avais vécu au collège, où certains de mes camarades portaient des manteaux à 5 000 euros – oui, les fameux Canada Goose. Ce sont des expériences dont je n’avais jamais eu l’occasion de parler. Je me suis dit : pourquoi ne pas le faire à travers une histoire ?
Enfin, je voulais absolument quitter les États-Unis et la France pour situer l’intrigue ailleurs. J’ai choisi l’Angleterre. Et, avec ce pays, venaient d’autres questions sociales, notamment celle de l’aristocratie : le fait que les personnes titrées méprisent profondément celles qui ne le sont pas, allant jusqu’à les ignorer. C’était l’occasion idéale d’en parler.
Et là, toutes les pièces du puzzle se sont alignées.
J’étais profondément excitée à l’idée d’écrire Faux-Semblants. Pour la première fois, je me lançais dans du new adult. Je n’étais plus contrainte par les codes du young adult : je pouvais créer des personnages plus nuancés, avec des problématiques plus matures. J’avais vraiment l’impression d’écrire une histoire différente de tout ce que j’avais fait jusque-là.
Jour après jour, je me levais, j’écrivais un chapitre et je m’endormais en rêvant du suivant. C’était l’une des plus belles périodes de ma vie. Bien sûr, j’ai pris plus de temps que prévu : je n’ai jamais pu envoyer le manuscrit pour le concours. Mais je ne regrette pas. J’ai terminé l’histoire à mon rythme, puis je l’ai relue. Et pour la première fois, je me suis dit : « Celle-là, elle peut être publiée. »
J’ai retravaillé le texte, je l’ai envoyé, j’ai reçu un refus. Mais je ne me suis pas laissée abattre. Grâce aux remarques données (même si je ne suis pas du tout d’accord avec le reste, comme le « Pas assez de tension entre Alexander et Isla » !), j’ai réécrit les cinq derniers chapitres. Et la deuxième fois… Faux-Semblants a trouvé sa maison d’édition.
Je sais à quel point l’édition repose sur la chance, sur la rencontre avec la bonne personne au bon moment. Je me sens extrêmement reconnaissante que ça se soit produit. Dès le départ, on m’a rassurée sur un point essentiel : le fait qu’Isla soit noire n’était pas un problème, bien au contraire – pas de risque qu’on me demande de changer sa couleur de peau ! Et j’ai su que c’était la maison idéale pour cette histoire.
Aujourd’hui, alors que Faux-Semblants prend vie, j’espère de tout cœur qu’il touchera d’autres personnes, qu’il aidera aussi et, surtout, qu’il résonnera auprès d’autres femmes noires en leur rappelant qu’elles ont droit, elles aussi, à être les héroïnes de romances.
Parce qu’on sait à quel point il est difficile de grandir sans jamais se sentir représentée.